LA CRISE SANITAIRE VECUE PAR NOS ENTREPRISES
Quelle a été votre réaction lors de l’annonce du confinement en tant que gérant / dirigeant ?
QP : Cela a été une grande surprise et une incompréhension totale. Ne pas savoir que faire si ce n’est de fermer comme demandé par l’état et le premier ministre. Enormément d’interrogations et d’échanges avec d’autres chefs d’entreprises sur qui fait quoi et quand ? De la culpabilité aussi de savoir si nous faisions le bon choix, si nous étions responsables ou idiots.
JC : Le président, Mr Macron, a fait sa première allocution un lundi soir. Il demandait aux Français de privilégier le télétravail quand cela était possible, ce qui ne nous concernait donc pas. Le lendemain, mardi, je laissais le choix à mes salariés de continuer le travail ou de se mettre en chômage partiel. Tous les deux ont voulu continuer.
CL: On s’y attendait, mais on n’est pas prêt pour autant. Incompréhension des annonces du gouvernement (doit on s’arrêter ou travailler en respectant les règles sanitaires? ). Mais confiant car les propositions d’aides gouvernementales avaient l’air d’être à la hauteur si l’entreprise devait s’arrêter totalement (chômage partiel et décalage des crédits).
Quelles ont été les mesures prises pour votre entreprise ?
QP : Fermeture totale de toutes les entreprises pendant 2 semaines et achat de gel, désinfectants, masques… prise en compte des nouvelles mesures pour mise à jour du document unique et application dans les entreprises. A partir de la 3ème semaine remise en route de certains marchés pour des grands comptes avec 1 salarié, puis 3, puis 5… A partir de la 5ème semaine nous avons remis environ 25% des effectifs des entreprises en route, en montant crescendo jusqu’au 11 mai où nous étions à 95% à nos postes dans le respect des gestes barrières et avec les moyens nécessaires pour garantir la santé de nos salariés.
JC : Continuant le travail alors que la France s’arrêtait de vivre, nous avions bien conscience d’être des privilégiés. Nous avons alors mis en place et appliqué quelques règles d’hygiènes : 1 par véhicule, utilisation de gants systématiquement, bouteille d’eau personnelle…
CL: . Fermeture pendant 6 jours. Après réflexion, nous avons compris que l’on pouvait et qu’il fallait reprendre l’activité pour ne pas mettre à mal la trésorerie, (malgré le chômage partiel que l’on a utilisé très peu, juste pour réduire le personnel et pour permettre d’appliquer les gestes barrières surtout dans les véhicules).
Comment s’est déroulée la reprise de l’activité ?
QP : Les salariés avaient à coeur de reprendre le travail et une incompréhension de la proportion que pouvait avoir les règles imposées. Le Finistère a été très peu touché, donc une certaine incohérence ressentie d’avoir autant de choses à mettre en place et à respecter. L’équipe avait une réelle dynamique au travail pour « remonter la pente » afin de garantir la pérennité des entreprises et répondre aux attentes de nos clients.
JC : Comme il n’y a pas eu d’arrêt, il n’y a pas eu à gérer de reprise.
CL: Plutôt bien, pas de réticence ou très peu de la part des clients pour intervenir dans leurs propriétés. Un peu plus compliqué avec les collectivités locales. Par contre au bout d’un mois et demi plus beaucoup de travail (car plus de devis à faire) mais la venue des congés nous a aidé à passer l’été et le travail et revenu en quantité à la rentrée.
Quelles sont les conséquences pendant la crise et après la crise pour votre entreprise ?
QP : Conséquence financière principalement avec une perte importante constatée sur mars et avril. Une frustration car nous étions sur un bel exercice après des périodes plus difficiles. Malgré cela nous avions de la solidité et la capacité à absorber. Les décisions prises sur la remise en place des équipes au fur et à mesure a permis de limiter grandement la perte et de satisfaire nos clients. A la suite nous avons constaté une forte hausse de la demande et énormément d’appels clients. Très vite en mai nous avons dû recruter des techniciens pour » rattraper le temps perdu » et répondre à l’affluence de nouveaux clients. Nous sommes donc passés d’une forte baisse d’activité à une forte hausse d’activité. Comme si nous devions réaliser en 2 mois, 4 mois de travail. A ce jour nous rattrapons la perte et nous poursuivons sur cette dynamique avec toujours beaucoup de demandes clients. Le grand changement est dans les habitudes nouvelles à prendre sur les mesures en place contre le COVID-19.
JC : Pour l’instant aucune conséquence. Je me dis qu’il y aura peut-être des répercutions plus tard… A voir…
CL: Pendant la crise le plus compliqué était de maintenir une bonne ambiance de travail. La convivialité a été mise à mal par les gestes barrières bien sûr, et de ce fait, les faire appliquer était parfois difficile. Après la crise : maintenir le respect des règles après un été de relâchement. Sur le point financier : trésorerie en hausse du fait des décalages de crédits de 6 mois (santé financière meilleure après).
Si un nouveau confinement devait avoir lieu, comment le vivriez-vous ? Que feriez-vous différemment ?
QP : Nous sommes équipés aujourd’hui pour faire face à une nouvelle vague de l’épidémie. Il me semble peu probable qu’un nouveau confinement puisse avoir lieu. Ce que je redoute le plus est d’avoir un salarié positif. Cela aurait deux impacts : sanitaire avant tout. Nous aurions à coeur que ce salarié n’ait pas de complications et s’en remette rapidement ou mieux, qu’il n’ait pas de symptômes. Impact économique ensuite où nous devrions potentiellement mettre tout ou partie de nos effectifs en quarantaine jusqu’aux résultats des tests qui pourraient permettre aux négatifs de reprendre. Si cela arrive, ça va geler nos activités pendant 48h minimum mais peut être bien plus en cas de cluster. Très compliqué à gérer !
JC : S’il n’est rien demandé de plus, je referais tout à l’identique. S’il nous est demandé plus de restrictions, à ce moment là nous verrons. Mais quoiqu’il arrive je reste optimiste, nous sommes trois, travaillons en plein air assez loin les uns des autres, je pense que nous limitons les risques. Quand je vois les difficultés pour certains autres secteurs d’activité, je me dis que c’est assez simple pour nous !
CL: Si l’état continu d’aider les entreprises et surtout les banques (décalage de crédits et PGE) pas trop d’inquiétude. Par contre si un nouveau confinement devait revenir, je ne le souhaite pas bien sûr (car la note des aides il faudra la payer un jour) je pense qu’ il faudrait s’organiser autour de ce virus et surtout continuer à travailler en respectant les gestes barrières (que je m’efforcerais de faire mieux respecter).
Quel serait votre meilleur conseil en tant que dirigeant pour appréhender ce type d’événement ?
QP : Tout réside dans l’anticipation ! Il est donc important de prendre les décisions au fur et à mesure sans précipitation pour optimiser les choix. Une pandémie s’accompagne de stress voir de panique autour de soi (famille, amis, salariés, fournisseurs, clients…). Il faut donc savoir agir de façon pragmatique après échange autour de soi afin de prendre un maximum d’éléments qui pourront peser dans la prise de décision. Ensuite il est important de communiquer avec ses clients mais aussi ses salariés dès qu’on a des informations sur la visibilité à court ou moyen terme de nos décisions. Tout le monde est dans l’attente de savoir et de comprendre, il est donc nécessaire de transmettre autant que possible même si cela n’est pas toujours évident et qu’on a pas toujours les réponses à l’instant T.
JC : Rester confiant et surtout ne pas céder à la panique générale. Agir en tant que bon chef d’entreprise en prenant les mesures adéquates pour la protection de tous dans le juste équilibre des événements vécus.
CL: Montrer à ses équipes que l’on gère la situation, en leur expliquant les effets sur la santé de l’entreprise, qu’ ils soient bien impliqués sur le fait que leurs efforts sont nécessaires à la sortie de crise. Il est très important de communiquer avec les collaborateurs mais surtout, le gérant doit garder: LA POSITIVE ATTITUDE !